Proposition d’une stratégie de suivi écotoxicologique des cours d’eau du bassin Seine-Normandie
Dans le cadre de la directive cadre sur l’eau (DCE), la qualité des cours d’eau est évaluée régulièrement selon des critères chimiques, physico-chimiques, biologiques et hydromorphologiques. Ce suivi, aussi appelé surveillance réglementaire, comporte des limites techniques : il ne permet pas de répondre à certains enjeux récents tels que l’évaluation de l’impact des molécules non recherchées, des substances émergentes ou la prise en compte de l’effet des mélanges de polluants (« effet cocktail ») sur les organismes aquatiques. Il existe toutefois des méthodes biologiques basées sur les effets qui semblent intéressantes à utiliser pour lever certains de ces verrous. En effet, ces méthodes aussi appelées bioessais ou biomarqueurs, permettent d’évaluer les dommages de polluants sur les organismes aquatiques en ciblant un effet biologique précis (reproduction, alimentation, activation enzymatique). Certaines de ces méthodes ont été déployées sur le bassin Seine-Normandie dans le cadre de projets ponctuels, mais il n’existe pas de suivi de biosurveillance en routine des cours d’eau à l’aide d’outils d’écotoxicologie. Ainsi, une stratégie de biosurveillance a été développée au sein de l’agence de l’eau Seine-Normandie pour constituer une batterie de méthodes robustes et opérationnelles à déployer sur l’ensemble du territoire du bassin. La stratégie développée intègre des bioessais sur matrice eau pour évaluer la toxicité générale sur différents organismes (bactéries, algues, crustacés, vertébrés) ainsi que la toxicité spécifique (génotoxicité et activité oestrogénique). Six bioessais seront déployés sur des stations qui ont été sélectionnées sur l’entièreté du bassin pour obtenir une image représentative du territoire. Cette démarche de proposition d’une stratégie de biosurveillance en routine à large échelle est pionnière au sein des agences de l’eau et sera mise en oeuvre dans le cadre d’un marché public à partir de 2025. La stratégie comporte toutefois certaines limites concernant la difficulté d’interprétation des résultats et le manque de réalisme environnemental. La faisabilité de la stratégie et la robustesse de la batterie constituée seront évaluées par l’agence de l’eau Seine-Normandie à partir des résultats obtenus et permettront d’envisager la pérennisation de la démarche. RÉSUMÉ
The monitoring of rivers of the Water Framework Directive (WFD) has technical limits. Recent issues such as the evaluation of the impact of emerging pollutants or the effects caused by the mixtures of substances on aquatic organisms are not covered by the regular monitoring. However, effect-based methods such as bioassays and biomarkers can overcome these challenges. These methods allow to evaluate general or specific effects of mixtures of pollutants on organisms (reproduction, behaviour, activation of metabolic enzymes). Some of these methods have already been used in the Seine-Normandy basin for temporary projects, but there is no strategy for routine biomonitoring of rivers. The water Agency has therefore developed a biomonitoring strategy to complement river monitoring using a range of robust and operational methods. The selected methods are bioassays on water samples to assess general toxicity on bacteria, algae, crustaceans, vertebrates and specific toxicity (genotoxicity and oestrogenic activity). The six bioassays selected will be deployed on river stations chosen to provide a representative picture of the basin. The proposal of a strategy for routine biomonitoring of rivers is a major step forward in the use of ecotoxicological tools and represents a pioneering approach on a national scale. However, it has several limitations, such as the difficulty of interpreting the results of biological tests and the lack of environmental realism of the chosen methods. The feasibility of the strategy and the robustness of the battery of bioassays will be assessed as part of a contract within the Agency from 2025.
Depuis la directive cadre sur l’eau (2000/60/EC) (DCE) adoptée par le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne en 2000, l’évaluation de l’état des cours d’eau passe par, d’une part, des analyses chimiques qui permettent de renseigner sur la contamination des milieux par un certain nombre de polluants et, d’autre part, l’évaluation de l’écart à la référence de paramètres physico-chimiques et d’indicateurs biologiques décrivant l’équilibre des communautés aquatiques en place afin d’approcher l’impact des contaminations qu’elles subissent. Cette approche comporte toutefois certaines limites : évaluation d’un nombre réduit de substances, absence de prise en compte de l’effet « cocktail » des polluants et évaluation des dommages à un niveau non précoce des biocénoses. Des méthodes plus intégratrices de la contamination comme les bioessais et biomarqueurs paraissent alors per – tinentes et leur utilisation semble intéressante pour compléter le suivi réglementaire. Ainsi, un travail de sélection d’une batterie de bioessais et biomarqueurs adéquats a été mené, dans le but de mettre en place un suivi écotoxicologique en routine à large échelle sur les cours d’eau du bassin Seine-Normandie.
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