Un filtre planté dans le bois de Boulogne : quelle intégration socio-spatiale d’un objet-frontière ?
A reed bed filter in Paris (bois de Boulogne): analysis of the social and spatial integration of a boundary object
RésuméLe déversoir d’orage Bugeaud situé dans le bois de Boulogne a fait l’objet d’une rénovation importante. Alors qu’il déversait auparavant directement en Seine les eaux pluviales d’un tronçon du boulevard périphérique, la Ville de Paris l’a récemment aménagé en l’équipant d’un système de stockage et de traitement de ces eaux par un filtre planté de roseaux avant leur rejet dans le réseau hydrographique du bois de Boulogne et à terme en Seine. Le projet Life Adsorb accompagne la réalisation et évalue l’efficacité de l’ouvrage, notamment sur l’abattement des micropolluants. Il intègre un volet sociologique sur les conditions d’appropriation de l’ouvrage par les services techniques de la collectivité ainsi que par les riverains alentours et les visiteurs du Bois. Afin d’analyser l’insertion socio-spatiale du filtre planté, nous avons eu recours à un cadre d’analyse fondé sur l’acceptabilité sociale, en différenciant l’enjeu et le problème d’acceptabilité. Nous avons donc regardé, d’une part, l’ouvrage comme un objet socio-technique qui, de sa conception à sa mise en service, passe par différentes étapes et réinterprétations (sociologie de la traduction et de l’innovation). D’autre part, nous avons observé comment cet ouvrage se confrontait à de nouveaux collectifs une fois construit. In fine, l’article illustre l’ambiguïté existante entre le souhait de faire de cet objet un « projet vitrine » d’une ville innovante et durable et la recherche d’invisibilisation par le paysagement. De fait, cet article montre comment ce type d’ouvrage assez commun agit comme un objet-frontière à l’intersection des savoir-faire et pratiques des différents services qui interviennent dans sa conception et sa maintenance, et des usagers. La connaissance acquise sur la conception et la maintenance de techniques alternatives souffre de ne pas être assez capitalisée au niveau des collectivités d’une part et entre collectivités d’autre part. Leur pleine insertion socio-spatiale reste dépendante d’une reconfiguration des organisations qui les reçoivent.
AbstractA stormwater system in the bois de Boulogne has deeply been renovated. Whereas it used to discharge rainwater from a section of the ring road directly into the Seine, the City of Paris took the opportunity to develop a green infrastructure (planted filter) for storing and treating this water. It is then discharged into the bois de Boulogne hydrographic network and eventually into the Seine. The Life Adsorb project aims at scientifically supporting and evaluating the effectiveness of the work, particularly to reduce micropollutants. This study includes a sociological component which has analysed the conditions of appropriation of the structure by the technical services of the local government, as well as by the local residents and users of this frequented green space. In order to analyse the socio-spatial insertion of the filter, we used an analysis framework based on social acceptability, differentiating between the objective and the problem of acceptability. On the one hand, we studied the device as a socio-technical object which, from its design until it was put into operation, goes through different stages and reinterpretations (sociology of translation and innovation). On the other hand, we observed how this infrastructure was interpreted by the visitors and the local residents of the green space, once it was built. Finally, the article illustrates the ambiguity between the desire to make this object a 'showcase project' of an innovative and sustainable city and the search for invisibility through landscaping. The article illustrates that the filter can be considered as a boundary object at the intersection of the know-how and practices of the various services involved in its design and maintenance on the one hand, and of the users and the designers on the other hand. A framework integrated the different dimensions of social acceptability and appropriation is proposed.
1 École des Ponts Paris Tech, Laboratoire eau environnement et systèmes urbains (Leesu) – Champs-sur-Marne / Institut national des sciences appliquées de Strasbourg (Insa) – Strasbourg / Lab’Urba, Université Gustave Eiffel (UGE) – Champs-sur-Marne
2, 3 École des Ponts Paris Tech, Laboratoire eau environnement et systèmes urbains (Leesu)
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