Les biofilms comme bio-indicateurs de la pression chimique en milieu aquatique urbain
Biofilms as bioindicators of chemical stress in urban aquatic systems
RésuméLes biofilms de rivière sont des communautés de micro-organismes se développant naturellement sur les surfaces immergées dans l’eau. Composés de micro-organismes autotrophes photosynthétiques (microalgues) et hétérotrophes (bactéries, champignons), ces communautés jouent un rôle fondamental dans le fonctionnement écologique des écosystèmes aquatiques. En outre, elles répondent rapidement à toute perturbation environnementale, ce qui en fait un matériel de choix pour évaluer l’état de santé des milieux aquatiques.
Les milieux aquatiques urbains sont aujourd’hui contaminés par des mélanges de micropolluants d’origines et de types variés. Il est difficile d’évaluer les conséquences sur le milieu de ce type de contaminations faibles, multiples et chroniques, qui n’engendrent pas nécessairement d’effets biologiques visibles et immédiats. L’utilisation des biofilms de rivière pourrait apporter une réponse à la question du suivi de l’état de santé et du bon fonctionnement des milieux aquatiques.
Une première étape de ce travail a été de développer une méthodologie permettant d’utiliser les biofilms comme indicateurs de la pression métallique en milieu urbain. Pour cela, nous avons développé une approche de type Pollution-Induced Community Tolerance (PICT) pour mettre en évidence une acquisition de tolérance aux métaux chez les communautés exposées. En parallèle, nous avons utilisé une technique d’empreinte génétique mettant en évidence des modifications de la structure génétique des communautés bactériennes et algales des biofilms exposés. L’acquisition de tolérance par une communauté exposée est en effet le reflet de son adaptation à un contaminant. Elle est aussi le reflet de modifications structurelles et fonctionnelles rendant la communauté potentiellement plus vulnérable à un stress ultérieur, mais qui sont aussi susceptibles de perturber le fonctionnement de l’écosystème.
Les méthodologies ont été validées au laboratoire par des expositions de biofilms à des métaux en microcosmes. Elles ont ensuite été appliquées sur le terrain à des biofilms prélevés et exposés dans le bassin de la Seine. Les résultats obtenus montrent une augmentation de la tolérance aux métaux pour les communautés prélevées en milieu urbain contaminé (notamment sur la Seine en aval de Paris par comparaison à l’amont). Ils confirment la sensibilité des mesures de tolérance à l’échelle de la communauté pour détecter l’impact de pollutions urbaines diffuses, notamment pour des sites où les niveaux de contamination restent faibles au regard des normes de qualité environnementales (NQE) de la directive cadre européenne sur l’eau. Ces résultats sont donc tout à fait prometteurs quant à l’utilisation des biofilms pour évaluer l’impact des contaminations urbaines multimétalliques.
AbstractRiver biofilms are communities of micro-organisms which naturally develop on submerged substrates. They are composed of autotrophic (photosynthetic microalgae) and heterotrophic micro-organisms and thus play an essential role in the functioning of aquatic ecosystems. Moreover, they respond rapidly to disruptions of environmental parameters which makes them particularly relevant to the study of the health of aquatic ecosystems.
Aquatic ecosystems are nowadays contaminated by mixtures of micropollutants of various types and origins. It is difficult to assess the ecological consequences of such low, multiple and chronic contaminations which do not necessarily engender clear and immediate biological responses. The use of river biofilms could help monitor the health and functioning of aquatic ecosystems. The first step of the study was to develop a PICT approach (Pollution-Induced Community Tolerance) to reveal an increase of community tolerance to metals after exposure. We also developed the use of a fingerprinting technique to reveal modifications of the genetic structures of bacterial and algal communities of exposed biofilms. Pollution-Induced Community Tolerance indeed results from adaptation of the exposed community to the toxic agent but also reflects structural and functional modifications within the community which might make it more vulnerable to further stress and also disrupt the ecological functioning of the ecosystem.
The methodologies that were developed were validated in the laboratory on biofilms exposed to metals in microcosms. They were then applied to biofilms collected and exposed in the field, in the Seine river basin. Our results show that metal tolerance of biofilms collected in urban areas increase, especially for communities collected downstream from Paris in the Seine river compared to communities collected upstream. They also confirm the sensitivity of community tolerance as an indicator of diffuse urban pollution, especially on sites where metallic contamination levels remain low when compared to Environmental Quality Standards of the European Water Framework Directive. These results thus support the fact that biofilms could be used as indicators of urban multi-metallic exposure.
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